Apprentissage de la conduite automobile et Psychomotricité
Apprentissage de la conduite automobile et psychomotricité
Chloé Antoine : psychomotricienne D.E, Master International en psychomotricité
Article paru dans la revue Evolution psychomotrice - Vol 26 - N°105
Résumé :
L'apprentissage de la conduite automobile, validé par l'obtention du permis de conduire est une activité complexe. La réflexion et l'expérimentation de ce mémoire portent sur les capacités psychomotrices nécessaires à l'apprentissage de la conduite automobile. Après avoir présenté l'activité de conduite automobile, l'apprentissage des habiletés motrices et les fonctions psychomotrices sollicitées, la méthodologie de la recherche sera développée. Elle repose sur la passation d'un bilan psychomoteur à deux groupes d'apprenants ayant obtenu leur permis de conduire en 27h ou moins, ou en plus de 47h. Les résultats, par le calcul d'un score d'aptitude, ont mis en évidence des différences significatives de compétences psychomotrices entre les deux groupes. De bonnes capacités motrices et visuo-spatiales apparaissent primordiales dans l'apprentissage de la conduite. L'intérêt de la psychomotricité est également développé à la fois pour estimer le nombre d'heures nécessaire à l'apprentissage de la conduite mais également pour faciliter cet apprentissage grâce au transfert horizontal d'aptitudes.
Mots clés : Conduite automobile, Apprentissage moteur, Habileté motrice, Aptitudes psychomotrices, Bilan psychomoteur:
Resumen :
El aprendizaje de la conducta automóvil, validada por la obtención del permiso de conducir, es una actividad compleja. La reflexión y la experimentación de esta memoria se refiere a las capacidades psicomotoras necesaria para el aprendizaje de la conducta automóvil. Después de haber presentado la actividad de conducta, el aprendizaje de las habilidades motrices y las funciones psicomotoras solicitadas, metodología de la investigación se desarrollará. Se basa en la entrega de la evalucion psicomotriz a dos grupos de estudiantes que obtienen les permitía conducir en 27h o menos, o además de 47h. Los resultados, por el cálculo de un resultado de aptitud, pusieron de relieve diferencias significativas de competencias psicomotoras entre los dos grupos. De buena capacidad motrices y visuo-espaciales parecen primordial en el aprendizaje de la conducta. El interés del psychomotricidad es desarrollado para considerar el número de horas necesario y el aprendizaje de conducta y también para facilitar este aprendizaje gracias a la transferencia horizontal de aptitudes.
Palabras clave: Conducta automóvil, Aprendizaje motriz, Habilidad motriz, Aptitudes psicomotora, Evalucion psicomotor:
Abstract :
The training of the driving, validated by the driving licence is a complex activity. This bief is about the psychomotor's capacities necessary for learning of driving. After having presented the activity of driving, the motor skills driving and the psychomotor functions requested, the methodology of research will be developed. It rests on the making of a psychomotor assessment with two groups having obtained driving licence in 27h or less, or besides 47h. The results, by the calculation of an aptitude''score, show significant differences in psychomotor competences
between the two groups. Good motor skills and visuo-space skills appear paramount in learning driving. The interest of the psychomotricity also developed at the same time to consider the number of hours necessary for having driving licence but also to facilitate this training thanks to the horizontal transfer
Keywords: Driving of a car, Moteur learning, Motor Skill, Psychomotor aptitude, Psychomotor evaluation
Introduction
La disparité entre les temps d'apprentissage de la conduite automobile chez chacun, questionne sur les facteurs interpersonnels qui l'influencent. La conduite automobile est une activité complexe mettant en jeu diverses aptitudes sensorielles, motrices et cognitives. Son apprentissage, validé par l'obtention du permis de conduire est pour certains difficile, long et fastidieux et semble solliciter des aptitudes psychomotrices.
Cette étude a pour objectif de vérifier l'existence de corrélations entre la présence de difficultés psychomotrices et le nombre d'heures de cours nécessaire à l'apprentissage du permis de conduire, en dehors de toutes pathologies avérées. Dans un premier temps seront présentés les apports théoriques concernant la conduite automobile, l'apprentissage des habiletés motrices complexes et les fonctions psychomotrices mises en jeu lors de cet apprentissage. Dans un second temps la méthodologie de la recherche sera présentée, puis les résultats seront analysés. Enfin nous répondrons aux questions suivantes : quelles sont les capacités psychomotrices qui influencent l'apprentissage de la conduite automobile et comment une prise en charge psychomotrice permettrait d'accélérer cet apprentissage.
La conduite automobile : une habileté motrice sollicitant des aptitudes psychomotrices
L'apprentissage de la conduite automobile est validé par l'obtention du permis de conduire. Le permis de catégorie B est le permis qui confère le droit administratif de conduire une voiture sur les voies publiques. Détenu par près de 2/3 des Français, il s'obtient suite à la passation d'un examen théorique et d'un examen pratique. Selon Masclet (2002), passer son permis de conduire constitue un acte social et économique important. En effet, il permet d'acquérir une plus grande autonomie et facilite l'accès aux loisirs et au marché du travail.
L'activité de conduite automobile a été décrite par différents modèles théoriques. On distingue notamment celui de Michon et celui de l'Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité. Michon (1985) considère l'activité de conduite comme un ensemble de tâches simultanées, ayant des exigences temporelles et cognitives différentes. Son modèle propose de subdiviser l'activité de conduite en trois niveaux hiérarchiques, le niveau stratégique, tactique et opérationnel. Le modèle de l'INRET détaille les comportements des conducteurs et les mécanismes qui permettent une juste adaptation à la situation et à l'environnement. L'action de conduite est divisée en quatre phases hiérarchiques d'opérations mentales : percevoir, analyser, décider, agir.
Ces différents modèles de la conduite automobile décrivent cette activité comme nécessitant des capacités psychomotrices et des capacités d'automatisation. L'apprentissage de la conduite consiste donc en l'apprentissage moteur d'une habileté motrice et psychomotrice.
Gagnon (2010) et Néboit (1974) s'accordent pour décrire la conduite automobile comme un processus dynamique et complexe mettant un jeu des modalités sensorielles et motrices, nécessitant des adaptations temporelles et spatiales. Si l'activité de conduite n'est pas décrite comme une activité psychomotrice à part entière, il apparaît nettement que l'apprentissage de cette habileté motrice décrite par Schmidt (1982) nécessite des aptitudes psychomotrices à différents niveaux d'intervention.
L'apprentissage moteur des habiletés motrices possède de nombreuses définitions selon les auteurs mais il existe un consensus sur le fait que l'apprentissage moteur est la résultante d'un processus interne, qui par expérience et exercice initie la modification des conduites motrices. On distingue communément trois courants, le courant cognitivisme (Schmidt, 1999), le courant écologique (Gibson, 2014) et le courant dynamique (Temprado & Gille, 2001)
La notion d'habileté motrice sous-entend celle d'apprentissage car elle n'est acquise que progressivement. Elle sollicite des aptitudes cognitives et psychomotrices selon les étapes de l'apprentissage (Paillard, 1976). La première étape de l'apprentissage est de nature cognitive. Elle correspond à la phase où les sujets cherchent à comprendre les exigences de la tâche. La dernière étape de l'apprentissage est de nature motrice et correspond à la phase d'automatisation.
Les aptitudes psychomotrices sont primordiales dans l'apprentissage moteur des habiletés motrices. Selon Perrot et al (2006), les aptitudes cognitives et psychomotrices expliquent une part non négligeable de la variabilité inter-individuelle au niveau de la performance lors d'une habileté motrice. En effet, les aptitudes cognitives demeurent de bons indices de prédiction des différences inter-individuelles en tout début d'apprentissage. Cependant la sollicitation des aptitudes cognitives diminue au fur et à mesure de l'apprentissage moteur jusqu'à devenir quasi nulle, alors que les aptitudes psychomotrices sont sollicitées de manière permanente tout au long de la pratique. Par la suite, elles demeurent les seules aptitudes liées significativement avec la performance. Les aptitudes psychomotrices apparaissent donc comme un déterminant permanent des différences inter-individuelles au cours de l'apprentissage d'une habileté motrice comme la conduite automobile, essentiellement dans la dernière phase de l'apprentissage de l'habileté motrice, soit l'automatisation.
L'apprentissage de la conduite automobile demande une réponse adéquate face aux informations visuelles, auditives, vestibulaires et sensitives, données par l'environnement. Les fonctions psychomotrices interviennent tout au long de l'apprentissage de la conduite. Il s'agit essentiellement de compétences sensorielles, motrices, tonico-émotionnelles, spatio-temporelles et attentionnelles. Chacune de ses compétences est évaluée par le bilan psychomoteur.
Mise en place d'une méthodologie
L'objectif de cette étude est de répondre à la question suivante, l'existence de difficultés psychomotrices peut-elle influencer la vitesse de l'apprentissage de la conduite automobile chez le jeune adulte ? Afin de répondre à cette problématique, nous examinons si il existe une corrélation entre les difficultés psychomotrices et la vitesse d'apprentissage de la conduite automobile, mais également si les compétences psychomotrices sont plus fortement corrélées à la vitesse d'apprentissage de la conduite automobile que les compétences attentionnelles.
La méthodologie choisie cherche à mesurer l'impact des troubles psychomoteurs sur la durée de l'apprentissage de la conduite automobile. Pour cela, il a été choisi de réaliser deux groupes, ceux ayant obtenu leur permis de conduire en un nombre d'heures égal ou inférieur à 27 heures et ceux l'ayant obtenu en plus de 47 heures.
L'échantillon clinique se constitue de jeunes conducteurs entre 18 et 25 ans ayant obtenu leur permis B dans l'année. Le choix de l'âge a été motivé par le fait que plus de 70% des personnes passant leur permis de conduire le font entre cette tranche d'âge. Afin de s'assurer de conditions d'apprentissage et de passation du permis équivalentes, chacun devra résider en Ile de France, aucun des sujets ne devra être porteur d'une pathologie mentale ou physique, ni avoir commencé son apprentissage anticipé en conduite accompagnée ou encore avoir bénéficié de séances de psychomotricité.
Afin de savoir si la présence de difficultés psychomotrices peut influencer la durée de l'apprentissage de la conduite automobile, les difficultés ont été identifiées par l'intermédiaire d'un bilan psychomoteur d'une heure. En effet, le bilan psychomoteur est constitué d'un ensemble d'épreuves et de tests et a pour intention d'objectiver la présence de difficultés psychomotrices chez les jeunes adultes. Le bilan a été passé auprès des sujets des deux groupes et les résultats ont été comparés afin de vérifier s'il existait des corrélations entre la présence de difficultés psychomotrices et la durée d'apprentissage nécessaire à l'obtention du permis de conduire.
Le bilan se compose de quatre facteurs de l'échelle de développement moteur de Lincoln-Oseretski (1978) (coordination globale, activités alternatives des deux membres, équilibre, coordinations manuelles), des tests cotés comme la figure de Rey (1954) ou l'épreuve de latéralité de Piaget Head (1964) ainsi que de certains des items du bilan psychomoteur de Giselle Soubiran (1975). Selon la réalisation, la cotation 0, 1, 2, 3 est attribuée. La cotation 3 représente la réalisation la plus élaborée, la cotation 2 une réalisation intermédiaire, la cotation 1 une réalisation présentant des difficultés psychomotrices, et enfin la cotation 0 si le sujet échoue.
L'entretien semi-directif a pour but de compléter les informations relevées par le bilan psychomoteur. Il intervient à postériori du bilan afin de ne pas être influencé par les informations recueillies lors de la cotation du bilan. Il a pour objectif de récolter des éléments de l'anamnèse (signe de difficultés motrices dans l'enfance...) ou encore le rapport à la conduite automobile (identifications parentales, motivation, antécédent d'accident...)
Présentation des résultats
Pour la phase de traitement des données, nous avons utilisé le logiciel Statistical Package for the Social Sciences plus connu sous le sigle SPSS. Nous avons déplacé l'échelle initialement choisie de 0 à 3 pour la transposer de 1 à 4. Ce déplacement a été nécessaire dans le maniement des données avec une échelle standard de Lickert (dans laquelle est absente le 0) dans l'usage du logiciel SPSS. Les variables analysées correspondent aux différents items du bilan psychomoteur ainsi que le nombre d'heures de conduite relevé lors de l'entretien et répartit en deux catégories - ou = à 27h et + de 47h.
Au final 20 variables ont été analysées ce qui a permis de réduire le modèle à deux dimensions à analyser. Le tableau de corrélation des axes fait ressortir que les heures de conduites sont corrélées à l'axe 1. Afin de vérifier si les variables sont bien représentées par les axes, nous avons examiné si nous étions proches de 1. En effet, plus la variable est bien représentée par l'axe, plus elle va contribuer au modèle. Nous avons retiré tous les items dont les valeurs étaient inférieures à 0,3. Les premières analyses statistiques montrent que certains paramètres sont fortement corrélés aux heures de conduite. Pour expliquer la variable heures de conduite, nous avons réalisé un second tri dans les variables pour effectuer l'analyse fine des variables fortement corrélées à la variable heure de conduite.
Au final, les variables retenues, car étant les plus fortement corrélées au nombre d'heures de conduite, sont les six variables qui apparaissent liées à la dimension 1, en abscisse sur le graphique, à savoir : Rey mémoire, Rey copie, item 6, item 35, Batterie de Piaget Head, item 8.
Pour mesurer la cohérence interne au score, nous avons calculé le coefficient alpha de Crombach (1951). Celui-ci s'établit entre 0 et 1, sa valeur est dite acceptable à partir de 0,7. Dans notre recherche le coefficient alpha de Crombach est de 0,96 en ce qui concerne la dimension 1 ce qui atteste d'une forte validité. 71,42 % de la variance est interprété avec l'axe 1 ce qui signifie que plus des 2/3 de la variance sont expliqués uniquement par l'axe 1. 22,69 % de la variance sont expliqués par l'axe 2. Au total, 94,11 % des informations sont interprétées.
Afin de vérifier notre hypothèse principale, à savoir, si l'existence de difficultés psychomotrices influence la vitesse de l'apprentissage de la conduite automobile chez le jeune adulte, nous avons calculé un score d'aptitude. Ce score d'aptitude a pour objectif de rendre compte des capacités psychomotrices des sujets. Le calcul du score d'aptitude est effectué par la somme des six variables étant le plus fortement corrélée au nombre d'heures de conduite. Chacune des six variables ayant 4 modalités (1-2-3-4), le score a une amplitude de 6 à 28.
On remarque que les scores forts sont associés aux nombres d'heures de conduite faibles tandis que les scores faibles sont associés aux sujets de la catégorie de plus de 47 heures d'apprentissage. Les sujets ayant obtenu leur permis en 27 heures ou moins obtiennent en moyenne un score de 25,44/28. Les sujets ayant obtenu leur permis en plus de 47 heures de conduite obtiennent en moyenne un score de 11,36/28. Il apparaît donc qu'il existe bien une corrélation entre les aptitudes psychomotrices évaluées par les six épreuves et tests sélectionnés, et la durée de l'apprentissage de la conduite.
L'hypothèse principale soutenue dans cette recherche est qu'il existe une corrélation entre le temps d'apprentissage de la conduite automobile et la présence de difficultés psychomotrices. Le bilan psychomoteur réalisé auprès de vingt sujets et son analyse, permettent de valider cette hypothèse. En effet, les sujets du groupe contrôle ayant obtenu leur permis de conduire en 27 heures ou moins, obtiennent un score d'aptitude beaucoup plus élevé que ceux du deuxième groupe ayant obtenu leur permis en plus de 47 heures.
L'hypothèse secondaire de cette recherche, à savoir que les compétences psychomotrices sont plus fortement corrélées au nombre d'heures de conduite que les compétences attentionnelles, est partiellement validée. En effet, le test de Stroop a été retiré de l'analyse des données tant il n'était pas discriminant et le test de la D2 est apparu peu corrélé au nombre d'heures de conduite (0,375). Cependant, l'épreuve de mémoire de la figure de Rey qui apparaît fortement corrélée aux heures de conduite fait appel à des compétences cognitives et attentionnelles. Cela confirme les travaux des différents auteurs pour qui les compétences cognitives n'interviennent qu'en tout début d'apprentissage d'une habileté motrice, tandis que les compétences psychomotrices ont une place primordiale tout au long de l'apprentissage moteur.
Importance des compétences motrices et visuo-spatiales
Les compétences motrices apparaissent fortement corrélées au nombre d'heures de conduite notamment l'item 6 « taper rythmiquement avec les pieds et les doigts » évaluant la coordination globale, l'item 35 « ouvrir et fermer les mains » évaluant l'activité alternative des membres ainsi que l'item 8 « mouvement des doigts tricotage » évaluant les coordinations manuelles. Ces trois items évaluent plus spécifiquement les capacités du sujet à coordonner ses mains et ses pieds, à dissocier l'hémicorps gauche et droit, et à adopter un juste timing moteur. Il apparaît que les jeunes adultes présentant des difficultés, même minimes, de coordinations, dissociations, timing moteur et proprioceptives mettront un temps supérieur pour obtenir leur permis de conduire.
Les compétences visuo-spatiales apparaissent fortement corrélées au nombre d'heures de conduite notamment celles évaluées par la batterie de Piaget Head, et la figure de Rey. La batterie d'orientation droite gauche de Piaget Head étudie la possibilité du sujet de s'orienter dans l'espace, en particulier, sa reconnaissance des coordonnées spatiales droite-gauche. La figure de Rey, composée d'une épreuve de copie et d'une épreuve de mémoire est une épreuve multi-factorielles qui permet d'analyser les aspects visuo-spatiaux ainsi que les capacités de structuration spatiale et perceptives. Les erreurs commises à l'épreuve de mémoire, ne proviennent pas de troubles mnésiques mais de troubles perceptifs. Les jeunes adultes ayant des difficultés visuo-spatiales et de repérage droite gauche révélées par les tests mettent plus de temps pour obtenir leur permis de conduire.
Pour faciliter l'apprentissage de la conduite automobile, il convient d'analyser les configurations d'aptitudes requises par les tâches motrices. Les résultats de cette recherche mettent en avant l'importance des compétences motrices et visuo-spatiales.
Apport d'une prise en charge psychomotrice dans le cadre de l'apprentissage de la conduite automobile
Une prise en charge psychomotrice permet d'améliorer et de renforcer les aptitudes psychomotrices des sujets et par la notion de transfert horizontal des aptitudes, leur application lors de l'apprentissage de la conduite automobile. Le transfert d'apprentissage se définit par l'influence d'un apprentissage antérieur sur l'acquisition d'une habileté nouvelle. La notion de transfert d'aptitudes est primordiale dans la compréhension des mécanismes de l'apprentissage d'une habileté motrice, notamment le transfert horizontal qui permet de faciliter l'apprentissage d'une habileté motrice en mobilisant les aptitudes cognitives, motrices ou psychomotrices requises pour répondre à une classe de tâches. Selon Famose « Des pratiquants possédant un haut niveau dans l'aptitude coordination pluri segmentaire pourront acquérir, avec une grande aisance, l'habileté à piloter une voiture de course. » (1988, p. 96) De cette manière, les aptitudes internes du sujet sont sollicitées en amont pour permettre un apprentissage facilité.
L'évaluation des compétences psychomotrices est primordiale pour définir au mieux un projet thérapeutique et mettre en place une prise en charge adaptée à chaque patient. Dans le cadre de l'apprentissage de la conduite automobile, le bilan psychomoteur peut également avoir sa place comme outils évaluateur du temps d'apprentissage nécessaire aux élèves des auto-écoles. Il s'agit d'un outil de travail pour les psychomotriciens qui permettrait d'évaluer le temps d'apprentissage du sujet et de lui proposer une prise en charge adaptée afin de l'accompagner dans l'apprentissage de la conduite et de réduire le temps d'acquisition du permis de conduire. Les résultats de la recherche ont mis en avant deux façons d'évaluer rapidement les aptitudes du sujet impactant sur le temps d'apprentissage.
Le calcul du score d'aptitude permettrait de prédire si l'élève aura son permis en moins de 27 heures ou en plus de 47 heures d'apprentissage de la conduite en auto-école. Un score haut (supérieur à 20/28) signifiant que l'élève ne présente pas de difficultés psychomotrices et aura probablement son permis en moins de 27h. A l'inverse, un score bas (inférieur a 20) signifiant que l'élève présente quelques difficultés psychomotrices et qu'il lui faudra plus de 47 heures pour obtenir son permis de conduire.
L'analyse bi-variée, soit l'étude statistique des relations pouvant exister entre deux variables démontre que le score à la figure de Rey et le score à l'item 35 du de l'échelle de développement moteur du Lincoln Oseretsky, tests du bilan, qui objectivent des difficultés psychomotrices, permettent d'estimer le temps pour passer son permis. En effet, il ressort que les variables « heures de conduite » et « épreuve de mémoire de Rey » sont très significativement dépendantes (0,96). A cela le V de Cramer montre l'association forte. Ces résultats confirment que le temps d'apprentissage de la conduite est fortement et très intensément associé aux résultats de l'épreuve de mémoire de la figure de Rey. De la même manière, il ressort que les variables heures de conduite et item 35 du Lincoln Oseretsky sont association de manière significative. L'intensité mesurée par le V de Cramer est de 0,905. La passation de ces deux tests se révèle donc être un outil efficace pour estimer le temps nécessaire à l'obtention du permis de conduire.
Conclusion
L'apprentissage de la conduite automobile validé par l'obtention du permis de conduire est un acte important, symbole d'autonomie et de liberté. Si pour certains il ne s'agit que d'une formalité, pour d'autres l'apprentissage est long et fastidieux. Cette disparité entre les temps d'apprentissage de la conduite automobile chez chacun, interpelle et de ce fait nous questionne sur les facteurs interpersonnels qui l'influencent.
Afin de répondre à cette question, nous avons souhaité faire une étude sur l'apprentissage de la conduite automobile et les capacités psychomotrices. Pour cela, nous avons élaboré un protocole de passation et construit une grille d'observations dans le but d'établir des corrélations entre la présence de difficultés psychomotrices et le temps d'apprentissage de la conduite automobile chez l'adulte de 18 à 25 ans.
Les résultats de cette recherche ont permis de constater qu'il existe bien une corrélation entre le nombre d'heures de conduite et la présence de difficultés psychomotrices et ont mis en avant le lien étroit qui existe entre certaines difficultés psychomotrices et le temps d'apprentissage de la conduite. Les compétences psychomotrices dans les domaines visuo-spatiaux ou moteurs (coordination, dissociation) apparaissent comme un prédicteur pertinent pour évaluer les capacités d'un sujet à apprendre la conduite automobile.
La psychomotricité, de par sa singularité, apparaît comme nécessaire et a parfaitement sa place dans l'accompagnement des candidats au permis de conduire afin de les aider à optimiser leurs compétences psychomotrices et à les appliquer dans l'apprentissage de la conduite afin de réduire le temps avant l'obtention du permis de conduire.
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